Hallowe'en (Hallowed evening : soir des Saints)
Nuit du 31 octobre au 1 novembre.
Le sacré est du côté du réel ! Dieu et le Diable y ont fait leur demeure. Devant ce réel sacré et souvent innommable, nous nous rassurons en parlant et en inventant des histoires.
Nous faisons du bruit quoi ! comme les petits enfants lorsqu'ils doivent traverser un endroit sombre. C'est pour nous donner une contenance. Lorsqu'un juif, autrefois, avait l'audace de mettre un nom sur Dieu, il se faisait lapider.
C'est que le bon Dieu et le mauvais Diable, ça les remue quand on parle d'eux. D'ailleurs, plus on les appelle, plus ils viennent.
Mais reviennent aussi les dieux et les diables du polythéisme. A partir d'Hallow'een, on les a sur le dos jusqu'à Pâques, au moment où le dernier revenant : Jésus, remontera définitivement - pour 9 mois.
Hallowe'en n'est pas une fête américaine, même si elle nous revient par le biais du nouveau continent. C'est une fête Irlandaise et Celte, sans doute une des plus vieilles du monde : Samain ou Sawein, fête située, comme les fêtes principales du calendrier Celte, entre équinoxe et solstice. C'est la fête qui ouvre les échanges avec l'au-delà. C'était aussi la fête des guerriers.
Elle fut introduite en Amérique vers les années 1840 par les colons irlandais. Mais elle a longtemps persisté en Savoie.
Promenez-vous dans la campagne, la nuit du 31 octobre au 1er novembre, vous verrez les gens de l'au-delà dans la réalité des rochers, les arbres, les plantes. Vous les verrez dans les rivières, les collines et les montagnes. Vous les verrez dans l'herbe et qui sait si vous n'en foulerez pas de vos propres pieds ! Mais attention, il ne sont pas très sociables et puis, vous rencontrer, ça leur ferait mal.
C'est qu'au 31 octobre, le purgatoire s'ouvre et les âmes changent de résidence, ils envahissent le territoire des vivants. S'ils rencontrent un humain, ils sont obligés de retourner à leur ancienne demeure. Méfiez-vous aussi de ne pas vous faire enlever.
En fait ils quittent ce qu'on appelle les Forts, bâtisses de pierres sèches ou cercles entourés de buissons, qui sont le territoire sacré de leur résidence. On les appelle aussi les Sidh. On y entend quelquefois des bruits de fêtes qui rendent jaloux les vivants qui tentent alors d'entrer en contact avec les morts pour bénéficier de leur "Paradis".
Il faudra vite rentrer à la maison et placer des bougies et des chandelles à vos fenêtres afin d'éclairer la nuit. N'oubliez pas non plus de passer par le cimetière pour mettre un cierge sur la tombe d'un parent défunt et éclairer les chemins pour les morts.
Vous creuserez aussi des raves, des navets ou des citrouilles en leur donnant l'aspect de crânes, avec une bouche, des yeux et un nez. Mettez-y une bougie à l'intérieur. Les morts sauront alors qu'on pense à eux et ne vous feront pas de mal.
Toute une série de rites mettront les humains en rapport avec les morts. Le repas du jour sera fabriqué avec le chou. N'oubliez pas que les humains naissent dans les choux (le chérub Hébreux) mais aussi, qu’ils peuvent y mourir... dans les choux. C'est un des légumes les plus en rapport avec l'au-delà. C'est une belle image du crâne : blanc et chauve.
N'oubliez pas que les morts sont tout-puissants et maîtres de la fécondité. Nous aurons bien du bénéfice à les honorer - autant qu'on les honorera à Carnaval - en imitant leurs processions, en éclairant leurs routes, en leur donnant des corps provisoires, eux qui n'en ont plus.
Ce seront surtout les jeunes gens, presque en âge de se marier qui seront les acteurs de cette fête initiatique de la fertilité. Pas questions d'une tristesse romantique. Pour l'instant, c'est la joie !
Dans la campagne, on y rencontrera essentiellement deux personnages :
La Banshee, Dame blanche, femme du Sidh, béàn ou bé caointe, pleureuse qui suit la procession en se lamentant.
Elle est souvent en train de se peigner. Quelquefois des hommes essayent de lui voler son peigne mais, comme notre Mélusine, elle possède un miroir-rétroviseur. Ca évite bien des inconvénients. C'est la Vierge qui veille sur les morts.
C'est aussi l'ancienne Morrigû, qui autrefois annonçait la mort.
Le Puça, fantôme, parfois animal, cheval ou âne, taureau ou bouc ou encore escargot, chien ou cochon.
Dans un article sur Hallowe'en, Véronique Guibert de la Vaissière relie le cheval-Puça aux chevaux jupons des fêtes françaises, c'est-à-dire à une tradition de la fertilité. La fête d'Hallowe'en n'est pas loin de celle du cavalier Saint Martin qui dispense l'abondance. Tout célèbre la fécondité ou la fertilité. Les vivants sont intimement reliés aux morts car sans eux, pas de fertilité possible.
J'ai trouvé, dans un journal, un petit article sympathique (Gérard Menachemoff) relatant que les habitants de Saint Martin la Porte, en Maurienne, jouaient un mystère pour la Saint Martin. Un des 73 personnages, le Fou, récite les vers suivants :
Je vois là-haut sur les encombres des courges, melons et concombres je vois là-haut une grande fête de ceux de la Synagogue les uns métamorphosés en ours, les autres en loup...
Samain devait être considéré comme un sabbat. Gérard Menachemoff rappelle qu'au XVIIe siècle, en Savoie, on croyait que la courge était un moyen pour le Diable de s'introduire dans le corps humain. Les ours et les loups sont des animaux psychopompes (conducteurs d'âmes). La proximité de Martin-ours donne à cette période sont caractère infernal (in-fernum : ce qui est en bas) Relisez Jean de l'ours.
L'église catholique, pour se maintenir, a dû christianiser les anciennes fêtes. Ainsi Samain-Hallowe'en est devenue la Toussaint. (835 Pape Grégoire V) Samain, sans doute toujours vivace dans la mentalité populaire, a du être repoussé au 2 novembre qui a été transformé en fête des morts par Odilon de Cluny en 998. On raconte qu'un pèlerin aquitain, revenant de terre Sainte, avait rencontré un ermite qui lui avait donné un message pour Odilon de Cluny. Le message faisait part de ce que l'ermite avait entendu les démons se plaindre de ce que les moines Clunysiens leur arrachaient les âmes par leurs prières. Cela incita Odilon à fêter les âmes des morts le lendemain de la fête des Saints. Cette fête ne fut généralisée que vers le 13eme siècle.
Il y avait chez les Romains la fête des Lémuria : apaisement des morts.
Certains disent que Samain fut la première fête instituée.
Nous entrons dans la période carnavalesque qui aura son acmé à Carnaval, 40 jours avant Pâques.
Le 31 octobre, c'est aussi Saint Quentin de Rome.
Tous à vos citrouilles pour qu'elles se transforment en carrosses... des morts. C'est une des fêtes de la psychose (maladie des âmes) Retournez donc à vos racines, ça fait du bien et ça ramone.