Hestia était fille de Cronos et de Rhéa. Elle ne prit jamais part ni à une querelle ni à une guerre, ce qui est unique dans l’Olympe. Elle fut toujours discrète et tranquille. Elle est patronne des foyers.  

L’exemple classique du feu brûlant perpétuellement devant une déesse vierge est celui du culte de Hestia-Vesta, qui représentait, chez les Grecs et les Romains, la divinité du foyer. Les noms et les cultes des déesses diffèrent à certains égards, mais leur source est la même. Le nom grec Hestia est aussi le nom qui signifie ordinairement “foyer”, “maison”, et feu central de l’univers. Euripide nomme Hestia la “Dame du Feu”.

Sa légende nous apprend qu’elle rejeta à la fois Poséidon et Apollon: “Elle n’en voulut pas; elle les refusa obstinément; et, effleurant la tête de son frère Zeus (1) , cette belle déesse fit un serment solennel qui, en vérité, a été tenu : celui de demeurer vierge toute la vie.”   Pour récompenser ce grand sacrifice, Zeus, son frère, (?) lui accorda de grands honneurs en guise de mariage; elle a sa place au centre du foyer, et la meilleure part. Elle est honorée dans tous les temples des dieux, et est la première déesse parmi les mortels.  

Un jour qu’elle participait à un banquet, tout le monde s’était assoupi. Hestia dormait, elle aussi. Lorsque Priape voulut la violer. Mais au moment ou Priape commençait à la chevaucher, un âne se mit à braire, ce qui mit Priape en fuite. C’était, paraît-il, assez drôle de voir Priape s’enfuir tant bien que mal.  

Hestia n’était pas seulement honorée dans les salles des conseils; au début et à la fin de chaque banquet, on lui versait du vin.. Car c’était la première et la dernière des enfants de Zeus, le commencement et la fin de la création divine. Selon la légende, le dieu avalait chacun de ses enfants à sa naissance, mais était obligé de les vomir. Hestia, la première-née, fut la dernière à être dégorgée, et mérita ainsi son titre.   Cette légende est une simple tentative d’exprimer, en termes mythiques, un trait central de la vieille philosophie de la fécondité. On croyait que le premier-né était le plus fort de tous les enfants parce qu’il était formé de sang menstruel au comble de sa force. Après l’enfant né d’une femme jeune, venait celui d’une femme plus âgée, primipare, juste avant la ménopause.  

L’idée semble avoir été que, pour une raison quelconque, les règles irrégulières ont un pouvoir supérieur aux autres. Ainsi les premières règles de l’adolescente, comme celles de la femme plus âgée mais toujours vierge, sont “spontanées”, c’est-à-dire toutes-puissantes. “Elles ont le pouvoir, dit Pline, de faire avorter des juments sur simple vue, même de loin   Assez naturellement, la menstruation était liée à la lune, “reine des étoiles”, dont la croissance et le déclin contrôlaient le sang des humains et la sève des plantes. Comme l’exprime Pline: “On croit, fort à propos, que la lune est l’étoile de l’esprit... qui sature la terre et remplit les corps par sa disparition... Le sang même des humains augmente et décroît selon sa lumière... les feuilles et les herbages... y sont sensibles, la même force imprégnant toutes choses.”  
Si les règles survenaient lorsque la lune était invisible elles avaient, croyait-on, un pouvoir incontrôlable : “Si cette force femelle s’écoule pendant une éclipse de la lune ou du soleil, elle provoquera des dégâts irrémédiables; de même lorsqu’il n’y a pas de lune. A de telles époques, les rapports sexuels causent la maladie et la mort chez l’homme.”   Dans la Bible, cette idée du pouvoir des premières et des dernières règles s’exprime par les histoires des héros nés de mères âgées, d’abord stériles, ou vierges, comme Isaac, Samuel et Jésus.

Le Nouveau Testament décrit le Dieu-Homme comme “le premier et le dernier, le commencement et la fin”, le “premier-né de toute créature”, l’aîné d’une multitude de frères” puisqu’en participant à la manducation on partage son droit de primogéniture.  
Il faut comprendre que cette virginité sacrée, attribuée parfois à des déesses qui passaient la plus grande partie de leurs vies imaginaires à sauter dans et hors du lit des dieux et des mortels, n’est pas principalement, ou même essentiellement, liée à des hymens intacts. Leur “virginité” résidait dans leur faculté d’avoir des enfants dont l’excellence venait de leur sang menstruel perpétuellement à l’apogée de sa force.

Retour

La version romaine du culte du foyer présente certains traits qui sont probablement plus primitifs que chez les Grecs.La caractéristique essentielle du culte de Vesta était l’entretien perpétuel d’un feu sacré par des vierges, les Vestales. Représentant, à l’origine, la maison royale, ces jeunes filles, d’abord au nombre de deux, puis de quatre et enfin de six, étaient appelées “princesses” et recevaient certains privilèges selon leur rang supposé. Elles étaient vêtues comme des mariées, pour indiquer leur virginité; âgées de six à dix ans, elles s’engageaient au service de Vesta pour cinq ans, c’est-à-dire jusqu’à la puberté et l’âge nubile.

Aux époques historiques cette période s’étendait à trente ans, peut-être pour les amener jusqu’à la deuxième meilleure période de leurs vies de reproductrices. Le mariage, permis après leur temps de service, était rare et considéré comme maléfique.  
Les filles étaient libérées du contrôle paternel en devenant vestales, et passaient sous celui du grand prêtre, le pontifex maximus.
C’était lui qui les recevait dans l’Ordre, prenait chaque candidate par la main et prononçait sur elle une formule d’admission. La chevelure de la jeune fille qu’il coupait alors était suspendue à un certain arbre.

La discipline était sévère. Si une vestale négligeait d’entretenir le feu sacré devant la déesse vierge, elle était battue. Si elle perdait sa virginité, elle était murée dans une tombe souterraine jusqu’à la mort - à moins qu’elle ne fût sauvée par l’intervention directe de la déesse qu’elle avait trahie.
Ses devoirs consistaient à apporter l’eau d’une source sacrée qui servait dans le sanctuaire et à préparer des aliments spéciaux. Elle s’occupait aussi de certains objets de l’autel. Personne, sauf les Vestales, n’ayant la permission d’entrer dans le sanctuaire intérieur, on connaît peu les rites et les objets sacrés. Comme c’est le cas pour la plupart des renseignements que nous avons sur les cultes du mystère, les détails que nous possédons reposent en grande partie sur des hypothèses.  

A l’époque du nouvel an romain, notre temps pascal, on célébrait une cérémonie où l’on éteignait et rallumait le feu sacré. L’Eglise fait jaillir le “feu nouveau” d’une pierre; les Vestales se servaient d’une perceuse qui perforait un bloc de bois, invention attribuée à Hermès, avec lequel était liée la déesse du foyer.(2)  

(1)  Hestia est fille de Cronos. Dans son livre “Le champignon sacré et la Croix”, John M. ALLEGRO écrit qu’elle est fille de Zeus. Je n’en connais pas la raison. J’ai moi-même changé “Père” en “frère” dans cet extrait d’Allegro.
(2)  La plus grande partie de ce texte est extrait de Le champignon sacré et la Croix”, John M. ALLEGRO, Albin Michel 1971. Voir aussi : “Les mythes Grecs”, Robert Graves, Fayard -”Dictionnaire des mythes”, Nadia Julien, Marabout 2303.

HESTIA
(foyer ou terre)

(VESTA : chez les Romains)
Retour