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AUTOUR DU MUGUET
Ce qui tourne autour du muguet est compliqué comme d'ailleurs le sont souvent les choses de la mythologie puisqu'elles sont toujours bâties sur le principe associatif. Mais des associations qui ne sont pas nécessairement celles que nous utilisons dans nos discours habituels qui se veulent rationnels et donc limitatifs.
Ces associations passent presque toujours par la rencontre des racines du langage. Racines vraies ou fausses, peu importe pourvu que leurs formes se ressemblent aussi bien phonétiquement que visuellement. Par exemple, saint Eutrope que l'on fête au 30 avril, par temps de lune rousse, est invoqué par les estropiés pour des raisons phonétiques car rien dans son martyre n’évoque l’estropié. On lui a tranché la tête avec une hache.
Étymologiquement, Eutrope signifie « celui qui tourne bien ». Contrairement à la lune rousse considérée comme ayant ses dangereuses menstrues calamiteuses. Elle est crainte comme la peste chez les paysans car elle détruit les jeunes pousses. Gelée de lune rousse, des plantes détruit la pousse.
Il faut reconnaître qu’en cette année 2016, le froid est tombé pile le 23 avril, jour de la saint Georges, premier des cavaliers qui composent le premier cycle des saints de glaces. Jourguet, (Georges au 23) Marquet, (Marc au 25) Troupet, (Eutrope, 30 avril) Croiset, (sainte Croix au 3 mai) sont les cavaliers. Mais un estropié, arrive-t-il à bien tourner ou se retourner ? Non.
Le terme « estrope » convient donc bien, en opposition, à « l'Eu-tropie » et son étymologie convient fort bien aux tordus estropiés qui ne peuvent plus se retourner sauf à obtenir un miracle de la part de leur patron bien tourné. Encore faut-il que ce patron soit de bonne humeur, « bien tourné ».
S'il est fêté le 30 avril, vers la fin des cavaliers qui tordent le cou aux plantations, c'est qu'il tempère la froidure des derniers sursauts de l'hiver. Sursauts qui risquent fort de jouer de mauvais tours aux paysans.
Cette propension à tempérer se retrouve chez plusieurs saints « humides » de la canicule qui, torride, dessèche tout. On y trouve saint Jean-Baptiste le velu et donc humide, (isomorphe de la végétation, 24 juin) sainte Marguerite et les eaux de la naissance, (20 juillet) sainte Marie-Madeleine la velue, (22 juillet) saint Jacques et Christophe qui traversent le fleuve. (25 juillet) etc. Ainsi, saint Léonard (ou Liénard – Fêté en octobre) est lui aussi invoqué pour délivrer ceux qui sont liés par le rhumatisme et l'estropie. En même temps, il sert à délivrer les prisonniers.
Un jour, saint Léonard (fêté en automne) fut surpris par un dragon contre lequel il se battit vaillamment. Ça ne l'empêcha par d'être blessé et de voir son sang couler. Mais chaque goutte de sang tombée par terre donna naissance à un pied de muguet. Il faut savoir que, éclos au mois de mai, chaque petite clochette du muguet rougit à l'automne en formant une baie. (Clochette des bois, Gazon du Parnasse, Grillet, Lis de mai, Lis des vallées…)
Son nom viendrait de "musc" - nommée autrefois "musguet" - en raison de l'odeur qu'il produit et qui rappelle la "muscade"
Il n'en reste pas moins que s’il est parfumé, il est hautement toxique. Il faut se méfier des fleurs, des feuilles et même de l'eau dans laquelle il est trempé. Il est un danger pour les chats.
C'est donc une fleur qui consacre l'arrivée du printemps ainsi que du mois des fiançailles. (On ne se marie pas en mai) Elle est donc symbole du bonheur qu'elle apporte avec elle.
On disait aussi que les petites clochettes blanches sont les larmes que la Vierge Marie aurait versées devant la mort de son fils crucifié. Le muguet est autant lié au sang pourpre qu'à la blancheur immaculée et spermatique. Jadis, le muguet, était considéré comme une plante magique hypocrite associée à la magie.
Le brin de muguet, porte-bonheur a souvent été associé à la Vierge Marie.
Pourtant, ses baies rouges font un puissant bouillon d’onze heures.
La distillation du muguet soignait autrefois les maladies nerveuses, l’apoplexie, l’épilepsie, les maux de tête, la goutte et les morsures d’animaux venimeux, l'arythmie cardiaque. On lui prêtait des pouvoirs diurétiques, purgatifs, fortifiants et antispasmodiques. Aujourd’hui reconnu toxique, il n’est plus utilisé. Ce qui m'amuse bien c'est l'ambiguïté de cette plante à la fois blanche et rouge (spermatique et menstruelle). Elle préfigure les rencontres des fiancés qui se promettent de devenir féconds.
Mais sont ambiguïté préfigure aussi les éventuels aléas de ce qui peut être à la fois la meilleure et la pire des choses. (CF. les souhaits de la reine dans le conte de Blanche-neige)
Le 1er mai est aussi la fête des sorcières, les Walpurgis. Déesses cavalières germaniques, elles étaient la promesse paradisiaque pour les guerriers teutons qui mouraient en se battant. Le muguet, plante vénéneuse, offert au 1er mai, n’évoquerait-il pas aussi les pouvoirs ambigus des forces féminines ?
Il n'est que depuis peu la fleur du 1er mai, fête du travail institué par le maréchal Pétain et le gouvernement de Vichy en 1941. Il a remplacé l'églantine, la rose des chiens, le cynorhodon, fleur délicieuse à manger ou à boire sous forme de sirop et qui apporte des vertus nutritionnelles importantes. À savoir que, l'églantine, a aussi son verset satanique puisqu’elle aurait été plantée par Lucifer qui, après sa chute, voulait s’en servir pour remonter au ciel.
« La légende grecque veut que le muguet ait été créé par Apollon, dieu du mont Parnasse, pour permettre à ses neuf muses de fouler de leurs pieds nus un tapis naturel soyeux et parfumé. » Était-ce pour mieux les empoisonner ?
Le muguet est aussi une maladie, une infection à levure de la bouche ou du sexe, soit des deux grandes portes corporelles du grand tube digestif autour duquel nous sommes construits : D’un côté la bouche et de l’autre le sexe ou l’anus. La « moniliase » ou « candidose » est incontrôlable.
Ne travaillez pas trop le 1er mai ! Et méfiez-vous des cadeaux fleuris.
Bonsoirs inquiets en attendant les saints de glace à la mi-mai.
Willy Bakeroot
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