Descendre sous la terre est une aventure dangereuse et mystérieuse. L’Homme a toujours hésité à s’enfoncer dans les mondes souterrains. Ne s’agit-il pas du royaume des morts ? C’est sans doute pourquoi les tunnels ont été si rares. Quant aux mines, on y faisait travailler les condamnés. C’est seulement depuis peu que les tunnels se multiplient. Les technologies récentes compensent en grande partie la peur de ces ventres obscurs et des aventures intestines.
Il y à 2.500 ans, l’architecte Eupalinos de Mégare, perça un tunnel de plus d’un kilomètre qui servait à amener l’eau à la ville de Samos depuis une source située derrière le Mont Kastron. Taillé dans la roche dure sa construction ne posait que le problème de la sueur des ouvriers.
Entre Naples et Pouzzoles Agrippa, en 37 après JC, fit percer un tunnel (crypta néapolitana) de 705 m de long, 4,50 m de large et 5 m de haut. Deux chars pouvaient y passer de front, mais comme il y faisait bien noir - seuls deux soupiraux éclairaient faiblement l’ouvrage - les gens qui l’empruntaient étaient priés de crier de temps à autre afin d’éviter une collision avec celui qui venait en face. On entendait régulièrement “Alla mare !” ou “Alla campagna !” selon qu’ils allaient vers la mer ou vers la campagne.
Mais il a fallu attendre le XIXe siècle pour voir proliférer l’attaque les montagnes sans craindre ce qui pouvait être considéré comme une vengeance tellurique. Il n’empêche que l’imaginaire y conserve sa part puisque les ouvriers des tunnel qui se construisent aujourd'hui installent, dès le commencement des travaux, une statue de sainte Barbe au milieu de leur chantier. Ainsi en est-il pour le tunnel de l'A86, autour de Paris. De même, on trouveras une statue au milieu des travaux du futur tunnel du saint Gothard. Il en fut de même lors du percement du tunnel sous la manche. Les ouvriers travaillaient sans relâche sauf le jours de la fête de sainte Barbe, le 4 décembre.
Elle protège tous les travailleurs
souterrains des explosions et de la mort subite. Elle personnifie sans doute
l’étrangeté des habitants des souterrains. Son nom “barbare” signifie “étrangère” et
aussi “sauvage”. (grec)
Elle rassemble l’étrangeté de
ces cavités mystérieuses où des personnages difficiles à définir
offrent aux humains, en miroir, l’image de leur propre indétermination.
Elle
est l’Autre du miroir, vierge
de toute compromission, germe de l’absolument neuf, potentiel de créativité.
Elle catalyse les forces telluriques dont elle est issue. On n’entre
pas impunément dans le ventre de notre mère la terre (GÉ)
ni dans le monde des morts sans en subir les conséquences. Autrefois,
si les mineurs étaient respectueux de la Terre-Mère, les «perforateurs» de
tunnels pouvaient passer pour des transgresseurs incestueux.
Les tunnels
d’aujourd’hui ont ceci de prétentieux : ils percent la
montagne sans en tenir vraiment compte sauf pour établir leur tracé.
Ils ne cherchent qu’à la dépasser, à l’annuler, à faire
comme si elle n’existait pas.
Contrairement
aux mineurs qui séjournent longtemps dans leurs galeries, on ne
s’attarde
pas dans les tunnels, on y passe. On se dépêche même
d’en
sortir. D’autres auront peur de ne pas arriver au bout du tunnel.
Certains n’osent pas y entrer avec leur voiture et peuvent être
gagnés
par des manifestations d’angoisse. Ils la traduisent par des problèmes
cardiaques, des spasmes du colon, des difficultés respiratoires
et autres problèmes fistulaires, etc.
Ils essayeront de traverser
le tunnel aussi vite que possible alors que d’autres rouleront lentement.
Ils peuvent aussi s’arrêter à l’entrée.
(1)
Les difficultés augmentent lorsqu’il manque des points
de repères visuels.
C’est que l’imaginaire est toujours lié intimement au
corps.
Le tunnel primordial est bien celui qui relie la bouche à l’anus.
C’est le passage autour duquel nous sommes construits. La santé dépend
du bon fonctionnement de ce passage par lequel transitent les souffles divers
et les produits de la terre que nous avalons.
La terre a toujours été considérée comme la “Mère”. Il faut dire que nous lui devons tout et que nous sommes de sa substance. La sentence chrétienne du mercredi des cendres : “tu es poussière et tu retourneras en poussière” n’est pas née d’une imagination délirante mais procède d’un ordinaire bien réaliste. L’attachement à la terre où nous sommes nés est général. Il peut provoquer des passions intenses. C’est que nous lui appartenons à cette terre.
Le premier homme s’appelait Adam, ce qui signifie “le terreux” et
plus précisément “terre rouge”, rappelant le sang
cataménial.
A notre époque où les humains sont imprégnés
du sentiment de toute-puissance, nous avons quelque difficulté à accepter
notre dépendance complète vis-à-vis de cet énorme
boule qui nous entraîne, malgré nous, dans une aventure indéfinissable.
A l’occasion de séismes, inondations et autres météorologies
terrifiantes, elle nous rappelle notre filiation.
Jocelyne Bonnet écrit
que “Les mythes relatifs à la
Terre Mère sont universellement répandus, ils expriment que
les humains sont sortis des entrailles de leur mère tellurique.
Nés de la terre, de l'arbre, du rocher, du puits, des végétaux,
ainsi s'expriment les métaphores qui sont loin d'être des
jeux d'image, ou des explications pour enfants.” (6)
De cette immense mythologie cosmogonique, on peut retenir la place de Chronos, fils obéissant aux pulsions vengeresses de sa mère, Oedipe avant l’heure, meurtrier et parricide.
Il représente le Temps à la fois destructeur mais aussi générateur. Il est forgeron et donc maître du feu qui transforme tout.
Les forgerons, maréchaux-ferrants, mineurs, fossoyeurs et autres artisans qui ont la prétention de manipuler la matière-terre ont toujours été considérés comme des êtres ambigus.
Ils sont à la fois maîtres du feu et même “maîtres des maîtres” ayant des pouvoirs fondamentaux. Ils sont aussi méprisables par leur comportement incestueux et leur audace à toucher au sang de la terre.
La
vie de sainte Barbe est un modèle mythologique incestueux. Ce
thème est récurrent dans les contes.
Son père Dioscore, paien, l’avait enfermé dans une tour de
manière à ce qu’elle soit inaccessible à tous les
prétendants. Dans sa forteresse, Barbe faisait des études sérieuses
qui l’amenèrent à devenir chrétienne. Son père
voulut l’en dissuader et lui proposa d’épouser un bon parti
païen. Elle refusa sous prétexte qu’elle préférait
se consacrer à un époux céleste. Il en fit d’abord
une « dépression » puis, la colère le gagna, saisissant
son épée, il voulut tuer sa fille. Barbe s’enfuit alors et
erra longtemps dans la montagne. Comme son père la recherchait, un rocher
s’ouvrit et Barbe s’y engouffra. Elle resta longtemps cachée
dans le sein de la terre.
Dioscore devenu féroce il la chercha jusqu’à l’épuisement.
Il finit par apercevoir deux bergers qui lui indiquèrent où ils
avaient vu une jeune fille qui se terrait. Barbe, l'entendant venir, sortit courageusement
de sa caverne et marcha devant lui pour se jeter à ses genoux. Il alla
trouver le préfet Marcien en lui racontant que sa fille était chrétienne.
Barbe fut convoquée devant le gouverneur. Marcien hors de lui fit infliger
bien des tourments. Elle fut mise sur un chevalet et déchirée avec
des ongles de fer. Puis on la brûla avec des torches ardentes qu'on lui
passa sur tout le corps. On fit de même avec des lames rougies au feu.
Le gouverneur ne savait plus quoi inventer pour tourmenter la vierge. Il
ordonna qu'on lui arrache les mamelles avec des tenailles ardentes puis de
la promener nue dans la ville en frappant sans cesse sur ses plaies. Enfin,
comme elle sortait toujours complètement guérie de ses plaies, Il ordonna qu'on lui
coupe la tête. Son père, revendiqua le droit de la décapiter.
Ils grimpèrent sur une montagne voisine où la jeune fille reçu
le coup de hache qui lui fit rouler la tête sur le sol. Le père
satisfait descendait la montagne en injuriant sa fille. Mais un feu vint du ciel,
le frappa et le consuma à tel point qu'il n'en resta que quelques cendres.
Marcien subit le même châtiment.
C'est la raison pour laquelle, maîtresse
du feu, Barbe est aussi la patronne de ceux qui l'éteignent, les pompiers.
Les mineurs l’invoquaient spécialement pour éviter le grisou.
Le perceur de tunnels veut gagner du temps.
Plutôt que contourner la montagne, il préfère la traverser
en son milieu. Il rejoint le souci majeur des alchimistes d’autrefois
qui consistait à s’assurer de la maîtrise du temps.
Les
mythes de l’alchimie obéissent au sentiment d’une intimité complète
entre l’Homme et la Terre considérée comme vivante et
mère de tous les Hommes. Une croyance universelle voulait que les
minéraux, substance de la terre, “poussent” comme les
plantes, ils se métamorphosent petit à petit pour devenir de
l’or.
Le sens de l’alchimie est d’aider la terre à mûrir
plus vite afin qu’elle atteigne l’état de noblesse que
représente l’or, car la caractéristique de ce métal,
qui ne peut être utilisé comme arme, est d’être
inaltérable. Il représente donc l’immortalité et
la souveraineté.
Si le but nous semble, celui d’une métamorphose seulement physique,
il n’en était pas de même autrefois où la maturation
minérale avait aussi une valeur hautement spirituelle.
Ne nions ni l’intérêt de ces thérapies ni le bien fondé des découvertes récentes de type scientifique, mais remarquons que se plonger dans la boue sollicite un imaginaire matriciel considérable qui par lui-même est déjà bien suffisant pour procurer le bien-être. Au XIXe siècle, la science promettait la maîtrise définitive sur la terre. “Le mythe sotériologique (16) du perfectionnement et, en définitive, de la rédemption de la nature, survit, camouflé, dans le programme pathétique des sociétés industrielles, qui visent à la transmutation totale de la nature, à sa transformation en énergie.” (17)
L’imaginaire des anciens n’a donc pas vraiment changé avec les sociétés modernes. Le mythe sotériologique garde toute sa force dans tous les domaines : il faut gagner du temps pour progresser vers le salut. Si les tunneliers n’ont pas pour tâche d’accélérer le Temps de maturation des minerais comme les alchimistes, ils n’en sont pas moins aux prises avec le Temps. Si le passage de l’alchimie à la chimie a permis un changement important des procédures dans le traitement de la matière terrestre, les idées des alchimistes se sont pérennisées. Percer un tunnel répond à “comment gagner du temps”. Le rêve alchimique est bien là mais sans la composante sacrée. Il ne s’agit pas ici de favoriser la croissance des substances de la Terre-Mère mais de lui percer le flanc. Les tunneliers se prendraient-il pour Ouranos ?
Nous arrivons au “bout du tunnel”, bien que notre chemin soit court par rapport à tout ce qu’il y aurait encore à écrire. Il nous reste à souhaiter que cette issue débouche, comme souvent dans de nombreux mythes “caverneux”, sur de “vertes prairies".
Si les procédés physiques de l’alchimie se sont transformés en raison de la logique des chimistes, le rêve alchimiste de devancer la nature, de la rendre parfaite, d’accélérer ses processus d’évolution, est resté bien ancré dans les imaginaires de ceux qui se veulent rationnels et objectifs.
Il reste important dans le domaine des médecines douces, par exemple, la pélothérapie, soins par la boue, est très ancienne mais elle s’est pérennisée grâce à des croyances alchimiques concernant l’oeuvre au noir. Cette boue est curieusement appelée “un précipité” terme chimique qui en dit long sur la connotation hautement temporelle de ce genre de rituel.
(1) D’après Jan van den Berg,
psychologue et fondateur de l’IPZO à Nimègue (Hollande),
on estime qu’un conducteur sur 7 est plus ou moins atteint de la phobie
des tunnels. Les héros de contes ne sont pas touchés par l’angoisse.
Ils ont pour eux la certitude d’un destin sans faille. Tom pouce ou
Jean de l’ours ne craignent rien.
(2) Cf. G. DURAND, Les structures anthropologiques
de l’imaginaire, Bordas Paris, p. 227
(3) Les héros de contes ne sont pas
touchés par l’angoisse. Ils ont pour eux la certitude
d’un destin sans faille. Tom pouce ou Jean de l’ours ne craignent
rien.
(4) Cf. G. DURAND, Les structures anthropologiques
de l’imaginaire, Bordas Paris, p. 227
(5) L’homme est ambigu face à ce
phénomène. Il en a peur et les désire inconsciemment.
Plusieurs contes comme “Jean de l’ours” ou encore “Jean
de fer” présentent le saignement à la cuisse comme l’aboutissement
du destin du héros.
(6) BONNET Jocelyne, Naître dans
les choux, une approche ethnologique de ce mythe culturel, Revue Civilisation
XXXVII - 1987 n°2. p.104
(7) Cf. ÉLIADE Mircea, Forgerons et
alchimistes, Garnier Flammarion, 1977
(8) Cité par P. Sébillot in “Les
travaux publics et les mines dans les traditions et les superstitions de
tous les pays,”, Éd. Guy Duriez, Paris 1979, p. 525.
(9) DIOGÈNE DE LAERCE
: cf. Vie
et sentence des philosophes illustres, Belles Lettres.
(10) Cf. “Voyages
aux pays de nulle part” Bouquins, Robert Laffont, pp. 982 à 1018.
Paris, 1990
(11) Id, pp. 63 à 73. – Voir
aussi Dante et Jules Verne.
(12) BONNET Jocelyne, “Le jardin
des femmes rurales, comment naît-on dans les choux ?” Intervention
au 110e congrès des sociétés savantes, Montpellier
1985.
(13) Cité par P. Sébillot
in “Les
travaux publics et les mines dans les traditions et les superstitions de
tous les pays,” p. 525, Éd. Rotschild 1894
(14) Pascal Quignard,
La haine de la musique, Folio 3008, Paris 1996, p.24
(15) Jérôme CARDAN ou Hieronimus
Cardanus, médecin milanais, XIIe siècle.
(16) Qui concerne le
salut et la rédemption
par le Christ
(17)
Cf. ÉLIADE Mircea, op. cit. p. 44
Le titre de Gazi (victorieux, très saint) est donné, dans l’ancienne Turquie, au guerrier revenu vainqueur et blessé.
Réalisé en 2008. Willy Bakeroot
Les
enquêtes de Paul Sébillot (8) nous révèlent que la terre
est posée
sur l'eau.
La partie solide ne serait d'ailleurs que de l'eau solidifiée.
Déjà en 600
avant Jésus-Christ, Le philosophe ionien, Thalès de Milet,
sans doute premier penseur connu de l'histoire, enseignait que la terre n'est
que de l'eau condensée.
Son système de l'univers mettait la terre plate au centre d'une bulle
hémisphérique.
La terre flotte sur l’eau et ses mouvements expliquent les tremblements de
terre. Pour la petite histoire, Thalès, qui voyait de l'eau partout,
mourut de déshydratation due à la faim et à la soif,
en regardant une compétition
sportive en plein soleil. (9)
En Bretagne surtout, la croyance était que l'ensemble
du pays reposait sur la mer. De longs bras de mer passent sous la terre.
À Saint Samson sur Rance, tout près de Dinan, se trouve la "clef
de la mer".
Il s'agit d'une pierre haute qui se trouve devant l'église. Si on
la retirait, la mer envahirait toute la France. Le menhir a des pouvoirs
fécondants. Les femmes venaient, et sans doute viennent encore, se frotter à la
pierre afin d'avoir des enfants.
La terre est divisée en trois parties : à l'extérieur la partie solide, puis la partie liquide puis, très profondément, la partie ignée ou les enfers. La partie liquide est une mer qu'il faut traverser en barque pour passer aux enfers. Le fleuve Styx y fait référence.
La tradition n'est pas seulement grecque. Elle était répandue en France où l'on plaçait une pièce sur la langue du mort afin qu'il puisse payer son passage. Ce qui retient d'abord notre intérêt est la partie solide qui n'est pas compacte mais remplie de nombreuses cavités qui peuvent être à ciel ouvert ou enfouies dans le sol. Certaines sont naturelles et d'autres creusées par l'homme. Cet ensemble est pour le moins touffu et indescriptible par un discours qui se voudrait rationnel. Le mythe est bien plus adéquat pour l'approcher.
Dans certains écrits, on trouve des paysages qui vont du bucolique au fantastique, avec des lacs, des soleils, des montagnes. Un texte anonyme paru en 1721 "Le passage du pôle arctique au pôle antarctique" (10) décrit le voyage en bateau, de trois ou quatre négociants, depuis le Groenland jusqu’au pôle sud à travers la terre. Les passages effroyables par des tourbillons qui entraînent le bateau font suite à des paysages calmes et colorés. Lacs et eaux chaudes amènent à des îles aux vallées de roses qui entourent des monuments étranges.
Plusieurs contes font descendre leur héros au fond d'un puits. Dans "Dame Holle", conte de Grimm, la petite fille saute dans le puits dans lequel était tombée sa quenouille. Elle y trouve Dame Holle qui a un édredon. En faisant voler les plumes de l'édredon, elle fait neiger sur la terre.
"Il y a des puits qui servent à la naissance des enfants. Au fond de ces puits, des âmes d'enfants attendent un corps pour naître à la vie".(12)
Lorsque l'on passe à pied sous un tunnel ou dans une grotte, le phénomène de résonance s'impose. Ce sont surtout les enfants qui se mettent à crier. Si les "ohé !" fusent, c'est que l'écho répond. Ces architectures sont sonores. On y entend non seulement des sons mais aussi des voix.
Tous les sons qui sortent de la terre font
peur. Lorsque la Terre expulse sa substance par la voie des volcans, elle
sème
la terreur en raison des conséquences de la lave destructrice mais aussi
en raison du bruit effrayant que cela provoque. Les cavités souterraines
ont souvent été utilisées
comme des instruments de musique.
On sait aujourd'hui que l'emplacement des peintures réalisées dans les grottes préhistoriques répondaient à la vibration sonore des chants des chasseurs. L'emplacement des parois décorées fut celui de l'écho.
Les dessous de la terre sont toujours mystérieux.
Le mythe des Symplégades illustre non seulement l’angoisse de l’avalage ou de la dévoration mais aussi celui de l’écrasement. Il s’agissait de deux énormes rochers qui bordaient le Bosphore à l’entrée du Pont-Euxin (mer noire). Ils se rapprochaient l’un de l’autre pour écraser les téméraires qui voulaient franchir la passe. Lorsque les Argonautes se présentèrent, ils envoyèrent d’abord une colombe. Les parois se rapprochèrent pour coincer l’oiseau mais il parvint a se dégager en y laissant quelques plumes de sa queue. Les parois s’étant alors écartées, les Argonautes profitèrent de ce répit pour passer. Mais l’arrière de leur bateau fut tout de même endommagé. Le vaisseau ayant réussi à franchir l’obstacle, les parois perdirent leur pouvoir et restèrent immobiles à jamais.
Ces récits s'articulent avec le mythe des 7 Dormants d’Ephèse qui, fuyants les persécutions de Dèce, s’étaient réfugiés dans une grotte dans laquelle ils s’endormirent. L’Empereur découvrit leur repaire et en fit murer l’entrée. Quand ils se réveillèrent, ils s’aperçurent, en sortant de la grotte, que tout avait changé dans le pays. Les gens et les choses avaient changé. Il découvrirent qu’ils avaient dormi pendant 377 ans. On les appelle aussi les 7 Renaissants.
L’alchimiste,
trouvant les secrets du temps, assurait sa propre métamorphose de
même qu’il assurait à la terre un devenir accéléré la
conduisant vers son destin aurifère.
Il fallait pour cela trouver
les secrets de la transmutation des métaux. En réalisant plusieurs
opérations de concassages et cuissons, l’alchimiste arrivait à la
phase appelé “l’oeuvre au noir” (nigredo). Phase
de putréfaction, fermentation, trituration d’où devaient
surgir les transmutations possibles.
Le passage de l’alchimie à la
chimie s’est fait très lentement et progressivement vers les
16e et 17e siècles.
Il est bon de rappeler que les “scientifiques” de l’époque étaient aussi de grands alchimistes. Kepler, Galilée et bien d’autres croyaient toujours au rêve alchimiste. 50% des écrits de Newton ont trait à l’alchimie.
Le langage médical utilise très souvent le
terme “tunnel” pour désigner l’anatomie de ce grand
axe, l’estomac étant un “tunnel court” qui a servi
de modèle aux alchimistes pour construire leurs cornues.
L’emboîtement inversable du ver de terre est
applicable aux humains : les produits de la terre dévorée par
l’Homme se métamorphosent pour rejoindre ensuite la terre.
Nous
passons dans le tunnel guidés
par le régime imaginaire des emboîtements. Ici, l'avaleur
est avalé par un énorme boa ! Va-t-il nous rejeter ? (2)
Avalés par la gueule de l’enfer, nous projetons nos “outils” d’avalage.
Mais dans cette situation, il ne nous est plus possible d’avaler la terre,
c’est-à-dire d’avoir un pouvoir sur elle. Tout au plus,
arrivons nous à avaler un peu de salive, résultat des effets
de notre angoisse. (3)
GÉ ou GAIA
La sortie de terre est semblable à une naissance.