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Calendrier février

Les histoires de saints sont toujours des histoires d'amour passionnées. Au bout de quelques lectures, surtout lorsqu'il s'agit de saintes martyres, on a l'impression d'être en pays connu. Les procédés cruels sont souvent les mêmes et les situations se ressemblent. Il est vrai que les mêmes récits sont appliqués à différentes saintes. Les variantes tiennent aux lieux et aux personnages qui ne portent pas des noms identiques.

 

La plupart du temps, la sainte se trouve en face d'un homme qui ne pense pas comme elle, qui obéit à une institution dans laquelle il tient un rang. Mais souvent cet homme est frappé par la beauté de la sainte et la désire. Plus il la désire, plus elle se refuse, plus il se sert de ses prérogatives pour satisfaire sa libido.

 

De son côté, la sainte se plaît aux tourments qu'elle désigne comme étant ceux d'un instant. Cet instant n'étant rien en rapport avec l'éternité de plénitude qui l'attend. Elle y trouve même des délices qu'elle ne raterait pour rien au monde.

Elle aime passionnément son divin amant qui lui promet un amour infini et la couronne de gloire.

Bien sûr, ce sont toujours des promesses pour un temps qui viendra "après".

 

Sans doute en a-t-il toujours été ainsi pour les humains qui attendent le temps futur comme un temps meilleur, indemne de toutes fautes, débarrassé des scories de l'usure. Tous les rituels de passages célèbrent la mort du passé et l'avènement d'un temps parfait.

Les soignants ritualisent la guérison, les scientifiques la maîtrise, les politiques le bonheur, les religieux la plénitude, les financiers le pouvoir d'achat et de rachat.

 

Mais au fond quelle importance ! Tant qu'il y aura des hommes, il en sera toujours ainsi. Et nous ne nous lasserons sans doute jamais de ces récits qui nous promettent un éternel eldorado grâce à la rédemption par un sauveur venu de loin et d'en haut.

C'est le travail du Temps avec ses métamorphoses. Personne n'échappe ni aux changements ni à la fascination du changement dont le spectacle, parfois, nous sidère à tel point qu'il nous empêche de changer.

 

En ce temps féminin de début de février, en ce temps de fécondité du printemps paysan, la fascination va du côté de la fécondité ramenée des enfers par les âmes des morts lâchées à la Purification-Chandeleur par l'ours Blaise du 3 février.

La terre se métamorphose et les primevères ne sont pas loin.

 

Lorsqu'on voit un tableau représentant une femme qui est en train de se faire couper les seins, avec une énorme tenaille, par un horrible militaire qui a un faciès diabolique, on est à peu près sûr d'avoir à faire à Sainte Agathe. Elle est aussi représentée comme un garçon de café, tenant un plateau sur lequel sont posés les deux seins coupés.

Agathe entre dans le cycle de fécondité qui parcourt le temps de début février et qui forme un cycle cohérent autour de la Purification-Chandeleur du 2 février.

 

Il existe beaucoup de confréries de Ste Agathe en France, en particulier dans l'est. Ce sont des confréries de femmes - Les hommes en sont exclus.

Le jour de la Chandeleur-Purification, en Espagne, par exemple à Candelaria, vers Salamanque, les femmes habillent leur mari du tablier ménager puis partent à la Mairie chercher la clef de la ville.

Elle passeront toute la journée au café à chanter et danser et à boire tranquillement.

Agathe est une des patronne des enfants.

Comme Sainte Lucie, elle est née en Sicile. Les gens de Palerme disent qu'elle est née chez eux, ceux de Catane prétendent qu'elle est native de Catane. Quoi qu'il en soit, cette vierge volcanique du troisième siècle n'est pas née loin de l'Etna. Elle était connue pour sa sainteté mais aussi pour sa beauté.

Or, il y avait en Sicile, un personnage très haut placé qui s'appelait Quintianus. Il était idolâtre, avare et débauché. Il comptait bien avoir Agathe dans ses filets. Comme il avait du pouvoir, il la fit arrêter pour la confier à une matrone du nom de Aphrodise. La matrone avait neuf filles aussi débauchées que leur mère. Cette jolie famille avait pour charge de corrompre Agathe. Elles avaient un mois pour réaliser le projet de Quintinius.

Mais Agathe ne se laissait pas faire. Elle résistait et restait ferme. Au bout d'un mois de stage intensif, Aphrodise et ses filles se révélèrent de bien mauvaises animatrices. Alors la matrone alla trouver Quintinius pour lui dire qu'il serait plus facile d'amollir des rochers et de donner au fer la souplesse du chewing-gum que corrompre l'âme d'Agathe.

Et aussi qu'elles s'y étaient mises toutes les neufs, jours et nuits, mais qu'Agathe la délicate, leur disait "bas les pattes scélérates, je ne suis ni renégate ni apostate. Pas question qu'on me pirate."

Un vrai coup de savate pour Quintianus qui n'était pas content du tout. Il la fit mander.

Puis il eut une vive discussion avec elle, du genre : "Ne t'avises pas de m'injurier sinon ça risque fort de mal tourner pour toi !" Agathe répondit :"Oui, tu viens de me dire que tes dieux étaient dignes d'être honorés; eh bien ! dit à ta femme d'être semblable à Vénus, et toi à Jupiter, ainsi vous compterez parmi les dieux." "Je n'ai pas besoin de toutes tes jérémiades; Sacrifie aux dieux ou je te ferai torturer." "Si tu me tortures, les anges me protégeront."

 

Alors, très en colère, Quintianus ordonna d'enfermer Agathe dans un cachot ténébreux. Pendant qu'on la conduisait, elle continuait à invectiver Quintinius, à le traiter de suppôt de satan, de satrape de pacotille, d'adorateur de Vénus, de prévaricateur pervers.

Elle clama "qu'il avait les fesses comme une herse, le sacrum comme un billard, la colonne vertébrale comme une cornemuse, la barbe comme une lanterne, le menton comme un potiron, les sourcils comme une lèche-frite !"

Oh pardon, ! C'est Rabelais qui dit tout ça sur Carêmeprenant, dans son quart livre.

 

Comme elle criait devant tout le monde, Quintianus était confus, il eut juste le temps de lui lancer "Pense à toi et reviens sur tes décisions, car il pourrait t'en coûter.". Seule Agathe était exultante d'allégresse à l'idée de son prochain martyre.

 

Le lendemain matin, Quintianus la fit comparaître à nouveau, et la discussion recommença comme la veille, vive, emportée, agressive, vindicative. Furieux, Quintianus la fit placer sur un chevalet afin qu'on la torture. Les bourreaux lui disaient dans l'oreille ; "laisse tomber, c'est pas la peine".
Elle répondait "oh non ! j'éprouve tellement de délices à cet instant, je me délecte au sein de ces tourments et je ne voudrais pas trahir celui que je vais rencontrer."

Quand Quintianus entendit ça, il devint ivre de jalousie et ordonna qu'on lui coupa la mamelle après l'avoir déchirée.

Je ne sais pas pourquoi les petits Bollandistes parlent de la mamelle alors qu'on lui a coupé les deux mamelles ?

Agathe rétorqua : "monstre, n'as-tu pas honte de mutiler dans une femme ce que tu as sucé dans ta mère ? Tu m'arraches les mamelles mais je garde en moi les mamelles spirituelles où mon âme peut se restaurer."

On la remit en prison avec l'ordre de ne laisser entrer ni médecin ni eau ni pain. Mais pendant la nuit, un vieillard lui apparut pour la guérir. Mais Agathe qui n'avait jamais eu recours à aucun médecin refusa pour ne pas trahir son amour divin d'où venaient ses souffrances et son espoir de guérison. Alors le vieillard avoua que c'était Jésus qui l'avait envoyé et qu'elle allait retrouver une santé parfaite.

 

Le vieillard avait à peine disparu qu'Agathe retrouva ses seins parfaitement rondelets. Il y eut une lumière intense dans la prison. Les gardes effrayés s'enfuirent en laissant les portes ouvertes. Mais Agathe ne voulut pas sortir afin de ne pas rater l'occasion du martyre.

 

Quatre jours plus tard Quintianus le refit comparaître pour lui tenir toujours le même discours. Comme elle refusait de sacrifier, il ordonna que l'on place sur tout le sol de sa prison des tessons de bouteilles cassées ainsi que des charbons ardents. Mais le sol se mit à trembler et un pan de mur écrasa Sylvain et Falconius, les mauvais conseillers de Quintianus. Catane fut ébranlée par le tremblement de terre.

Les gens accusèrent Quintianus d'être la cause du séisme parce qu'il faisait du tort à la vierge. Il prit la fuite non sans avoir fait enfermer Agathe dans une prison, loin du prétoire.

 

Agathe, dans sa cellule pria Dieu qu'il la fit mourir sur le champ. Elle fut exaucée. Elle poussa un grand cri et rendit l'âme.

 

On la mit dans un sarcophage tout neuf. A ce moment, apparut un jeune homme d'une grande beauté en tête d'un cortège de plus de cent enfants aussi beaux. Ils accompagnèrent l'enterrement puis disparurent.

 

Quintianus, apprenant la mort d'Agathe, partit pour confisquer les biens de la famille. Mais comme il traversait le fleuve dans une barque, un de ses chevaux le mordit et l'autre l'envoya dans le fleuve avec une ruade. Il se noya et l'on ne retrouva même pas son cadavre. Bien fait pour lui.

 

L'année suivante, à l'anniversaire de la mort d'Agathe, l'Etna entra en éruption. La lave déferla sur Catane. Mais les gens allèrent au tombeau d'Agathe, prirent le voile qui le recouvrait et le tendirent face à la lave qui s'arrêta tout de suite.

Le miracle se renouvela souvent.

 

Elle était tellement connue que Sainte Lucie alla en pèlerinage sur sa tombe afin de guérir sa mère.

 

Les femmes l'invoquaient pour les maux de seins.

 

Demain , c'est la Saint Gaston, qui a tué un dragon.

5 février

 

Agathe à Catane

 

Sainte Agathe

(la bonne)

 

 

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