Sixième femme de notre roi CLOTAIRE
1er. Elle honorait si fort les prêtres qu’elle leur baisait les
pieds et les servait à table.
Elle aimait tant la Croix qu’elle
s’en imprima la forme sur le corps, avec le bout d’une pique rougie
au feu; et qu’elle fit venir, pour la première fois en France, un
morceau de la vraie Croix.
Lorsqu’elle vit que son mari se
lassait d’elle, Radegonde se retira à Poitiers, où elle se
fit abbesse de religieuses. Elle avait tant de ferveur, qu’il fallait
à chaque instant lui appliquer sur l’estomac des feuilles
trempées dans l’eau, pour tempérer la chaleur qui la
dévorait.
Notre Seigneur la caressait souvent
visiblement. Une fois il lui apparut et la prit sur ses genoux : “Radegonde, lui dit-il,
vous n’êtes que sur mes genoux; bientôt vous serez sur mon
coeur.”
Quelques courtisans ayant calomnié
les moeurs de Radegonde auprès du roi, moururent honteusement en allant
à la selle; ce qui fit respecter la sainte.
Des marins, sachant la vertu de Radegonde,
l’invoquèrent dans une tempête, quoiqu’elle fut encore
vivante. Incontinent, une colombe blanche comme la neige voltigea autour du
vaisseau. Un matelot la prit, lui
arracha trois plumes qu’il trempa dans la mer, et aussitôt la mer
s’apaisa. Ces trois saintes
plumes se conservaient à Poitiers, où elles faisaient des
miracles.
Un an avant sa mort, elle vit la nuit un
jeune homme d’une exquise beauté, qui lui fit mille
carresses. Elle le repoussa
d’abord très durement, le prenant pour un séducteur; elle
avait alors soixante-huit ans. Mais le beau jeune homme lui parla si
honnêtement, qu’elle vit qu’il n’en voulait pas
à sa chasteté, et qu’il venait tout simplement lui annoncer
sa mort, de façon qu’elle le traita mieux.
L’abbaye de Sainte Croix, que Radegonde
fonda à Poitiers, avait deux cent religieuses lorsqu’elle
mourut. Malgré ce saint
établissement et la piété qu’elle fit
paraître, Radegonde fut en butte aux traits de la médisance. On lui reprocha sa trop grande
intimité avec le poète FORTUNAT, qui était sans cesse
auprès d’elle qui en recevait et lui faisait des présents
etc... Mais ces soupçons furent détruits par les miracles que la princesse opéra
après sa mort.
On vénérait à Poitiers le
corps de sainte Radegonde, qui se trouvait double dans l’abbaye de QUINCAI,
à deux lieues de cette ville, quoique les Normands l’eussent,
dit-on, anéanti au 9eme siècle. Il fut brûlé pour la seconde fois par les
Protestants, dans ces deux endroits en l’année 1562, avec tant de
publicité qu’on n’osa le reproduire. Mais son tombeau
faisait des guérisons miraculeuses au dernier siècle
En 1412, lorsque le Duc de Berri fit ouvrir
ce tombeau, on y trouva le corps de Radegonde encore entier,
quoiqu’enseveli depuis huit cent vingt ans. Le Duc voulut lui faire
couper la tête pour l’emporter à la sainte chapelle de Bourges. Les assistants furent saisis
d’une telle frayeur à cette proposition, qu’il fallut y
renoncer. Le prince se contenta d’emporter l’ANNEAU
D’ALLIANCE que la sainte avait au doigt; mais on ajoute qu’elle
retira sa main, lorsqu’il voulut aussi lui ôter l’anneau
religieux.
On voyait dans l’ancienne
église, la fameuse chapelle du PAS DE DIEU, bâtie sur
l’emplacement de la chambre qu’occupait la sainte. On contait que JESUS lui ayant apparu
sous la forme du beau jeune homme dont nous avons parlé, avait
laissé dans sa cellule l’empreinte d’un de ses pieds;
c’est ce qu’on nommait le PAS DE DIEU.
On montrait enfin la meule dont Radegonde se
servait pour moudre le grain nécessaire à la nourriture de ses
religieuses, et le mortier où elle pilait les drogues qu’elle
employait dans leurs maladies. Ce qui reste de ces saintes reliquesne fait plus
merveilles.
Extrait
de : DICTIONNAIRE CRITIQUE DES RELIQUES ET DES IMAGES MIRACULEUSES. Par J.A.S. COLLIN DE PLANCY 1822