SAINT HERVÉ
celt. Houarn-ber : fort et ardent

Fête le 17 juin

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Calendrier juin

 

Autrefois, les prêtres célébraient une "trentaine" de messes pour chaque mort (Arn ofern drantrel). Vingt neuf messes étaient dites dans la paroisse du défunt, la trentième était célébrée dans la chapelle de Saint Hervé au sommet du Ménez-Bré. (chaîne de l'Arez - communes de Pédernek et Louargat - vers Lannion et Guingamp)

On la célébrait à minuit en la disant à rebours, en commençant par la fin. On n'allumait qu'un des cierges de l'autel. Tous les morts de l'année y assistaient ainsi que tous les diables. La veille de l'office, on transportait dans la chapelle un sac de graines de lin. Le prêtre devait monter pieds nus vers la chapelle, afin d'être "prêtre jusqu'à la terre", un goupillon dans une main, un bénitier d'argent de l'autre.

Après la messe les démons accouraient en hurlant vers le porche de la chapelle. Le prêtre les faisaient passer en revue, leur imposant ordre et silence et leur enjoignant de montrer leurs griffes afin de voir si l'âme du défunt n'y était pas prisonnière. Ensuite, il leur distribuait à chacun une graine de lin - car les démons ne partent jamais les mains vides. S'il oubliait un des démons, il devait alors se livrer lui-même et se damner. Voilà pour la chapelle.

Après avoir passé quatre ans à la cour de Childebert, Hyrvanion, barde errant, originaire de la Bretagne insulaire arriva dans le Léonnais sous le règne de Hoël II. Il cherchait un navire en partance pour la Grande Bretagne.

La veille de s'embarquer, en songe, il vit un ange qui lui fit savoir :
"Dieu veut que tu t'établisses dans ce pays. Tu rencontreras, à la margelle d'une fontaine, une jeune fille nommée Rivanone. Tu l'épouseras et le fils qui naîtra de cette union sera un grand saint."

Bien qu'inquiet de ce songe, Hyrvanion décida de rejoindre son pays. En se dirigeant vers la mer, il rencontra une jeune fille. Elle s'appelait Rivanone.
"Je suis la soeur de Rivoaré qui habite cette maison derrière les arbres", dit-elle.

Hyrvanion lui raconta alors son rêve. Rivanone lui confessa qu'un ange lui était apparu et lui avait parlé dans les mêmes termes. Hyrvanion décida de ne pas continuer son voyage.

Avec l'accord de Rivoaré, (Rivanone était orpheline) Hyrvanion épousa Rivanone. Ils donnèrent naissance à Hervé.

Dès le lendemain de leur noces, Rivanone dit : "Si j'ai un fils, je souhaite qu'il ne voit jamais la fausse lumière trompeuse de ce monde !"
Hyrvanion répondit : "Oui mais qu'il ait au moins la vision des splendeurs célestes !" puis il quitta Rivanone pour la vie d'ermite.

Hervé naquit aveugle.

A l'école, Hervé émerveilla ses condisciples et ses maîtres. Ses propos était toujours plein de sagesse et de clarté. L'évêque de Léon, en ayant entendu parler, voulu lui conférer la prêtrise. Hervé n'accepta que les ordre mineurs. Sans doute ne voulait-il pas se laisser emprisonner dans une hiérachie et garder sa vie aventureuse.

Après l'avoir confié au sage Arzian sa mère se retira dans la solitude.

A la fin de ses études, Hervé vagabonda au travers du Trégor, accompagné de Guiharan, (ou Guich'Haran) compagnon un peu simple qui lui resta fidèle jusqu'à la fin de sa vie.

Un jour, l'âne dont Guiharan se servait pour faire les travaux des champs vint à se faire dévorer par un loup. Hervé convoqua le loup et l'obligea à remplacer l'âne dans les durs travaux. La présence du loup ne dérangeait pas les moutons du troupeau. De temps à autre, Guiharan exhibait le loup aux passants pour en tirer quelques menus profits. Hervé exercait alors son incomparable talent de chanteur. ainsi que ses facultés d'exorciste.

La popularité de l'aveugle devint grande. On tint plus compte de ce qu'il disait que de la science des plus grands docteurs.

Son port d'attache était une terre située non loin de Lesneven. Il y fit jaillir une source.

Un jour, il fut question de juger Comorre le Tyran (ou Conomor) qui en était à l'assassinat de sa septième femme, Tryphine, elle avait périt avec l'enfant qu'elle portait. N'étant pas d'accord sur le lieu ou devait se dérouler le procès, les évêques décidèrent qu'Hervé trancherait le débat. On dépêcha un cavalier pour le chercher. Il le trouva dormant dans un courtil de Pédernec, sur un lit de sauges en fleurs et la tête appuyée sur une ruche d'abeilles. Les bestioles butinaient en silence pour ne pas le réveiller. Averti, après son réveil, le saint étendit le bras vers le Ménez-Bré.

Le conseil se réunit alors sur la montagne. Hervé avait été prié de siéger à côté des évêques. Aveugle et, par surcroît, Celte, c'est-à-dire volontiers flâneur, il ne se pressait point pour arriver. Depuis longtemps, tout le monde l'attendait. Escorté de son loup et précédé de Guiharan, Hervé arriva enfin, achevant de manger des mûres contenues dans un pan de son manteau. Il ressemblait à un loqueteux.

Un des prélats ne put s'empêcher de chuchoter à son voisin : "Quoi, c'est pour ce moine aveugle et en haillons qu'on nous a fait attendre si longtemps !"

Bien que cela ait été seulement chuchoté, Hervé l'entendit :
"Mon frère, pourquoi me reprochez-vous mon infirmité ? Ne savez-vous pas que Dieu nous a fait comme bon lui semble ?"

A ces mots, en poussant un cri d'épouvante, l'orgueilleux prélat s'affaissa. Ses yeux pendaient hors de son visage. Hervé, touché de compassion le guérit en lui appliquant des simples. Cela se passait en juillet où la canicule avait tout desséché. Hervé, plantant son bâton fit jaillir une source qui désaltéra l'assemblée.

Chaque jour, Hervé voyait les saints du ciel, il pouvait les dénommer tous. Il fit don de cette grâce à l'évêque Houardon.

Il avait un pouvoir sur les démons. Il sauva Even, comte du Léon, d'un essai diabolique d'empoisonnement. Il précipita dans la mer un démon de l'ivrognerie.

Averti de sa mort six jours avant, il fit venir Houardon pour son dernier soutien. Sa cousine Christine, qui avait aidé sa mère dans son ermitage, mourut au même instant que lui. Tous deux entendirent les choeurs célestes célébrant l'entrée au ciel du moine poète.

Saint Hervé est un des saints les plus honoré en basse Bretagne. C'est une dévotion qui se fait plutôt le soir ou la nuit.

C'est devenu un proverbe : "voyager de nuit comme les pèlerins de Saint Hervé".

Il est un des patrons des chanteurs !

Anatole LE BRAZ Magie de la Bretagne - Bouquins - Laffont P 747 à 752
Joseph Chardronnet Le livre d'or des saint de Bretagne - Amor éditeur P 121 à 125

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