18 mars
Édouard et le coup
de l’étrier
Saint Édouard
(gardien
des richesses)
Il y a deux saints Édouard.
Édouard III, qui a construit l’abbaye de Westminster et que
l’on fête, depuis Paul VI, au 5 janvier alors qu’on le
fêtait au 13 octobre avant Vatican II, et Édouard II qui est celui
qui nous intéresse aujourd’hui.
Édouard II avait pour
père Edgar le Pacifique, roi d’Angleterre. Sa mère
s’appelait Engelflède. Edgar l’avait épousée
en seconde noce. Elle était fille du duc Ordmer. Il avait aussi une soeur :
Édithe. On ne sait pas de quel lit elle était sortie.
Mais Engelflède mourut alors
qu’Édouard était encore tout enfant. Edgar épousa
une troisième femme, une veuve : Elfride.
Elfride était fille du roi
Ordgar de Cornouailles et veuve du chef des anglais orientaux : Elwode.
Edgar et Elfride eurent un enfant :
Ethelred qui était donc le demi-frère d’Édouard.
Édouard fut baptisé
par Saint Dunstan, archevêque de Cantorbéry. Il était d’un bon naturel
et présentait de véritables dispositions pour la piété.
C’était le préféré de son père qui le
désigna rapidement pour son successeur.
Mais Elfride,
dépitée, jalouse, aurait bien voulu qu’Ethelred soit roi
à la place d’Édouard. Elle alléguait que la
mère d’Édouard n’était que fille de duc alors
qu’elle, Elfride, était fille de roi.
Comme toutes les belles-mères
des contes et d’ailleurs, elle lui en faisait voir des vertes et des pas
mûres. Elle racontait qu’Édouard avait un caractère
violent et qu’il allait jusqu’à frapper ses serviteurs. Elle
fomenta donc un parti pour défendre l’accès à la
royauté d’Ethelred. Elle jura la perte d’Édouard.
Pourtant, Édouard, affable,
plein de douceur et de bonté, aimait tendrement son petit
demi-frère et ne s’inquiétait pas des complots de sa
belle-mère.
Édouard avait douze ans
lorsque son père mourut. C’était le 8 juillet 972.
Elfride se frotta les mains en
ricanant devant son miroir. Miroir, petit miroir, Ethelred est-il le plus beau
? Mais oui répondait le miroir, Ethelred est très beau, mais,
assis sur le trône, Édouard est mille fois plus beau.
Édouard, grâce à
la constance de Dunstan de Cantorbéry et d’Oswald d’York,
fut sacré roi, malgré les menaces des partisans d’Ethelred.
Il devint un excellent roi,
réprimant les ennemis de l’État et récompensant les
fidèles sujets. Il était très charitable et très
judicieux dans ses conseils. Les petits Bollandistes rajoutent qu’il
chérissait par dessus tout la chasteté. Je leur en laisse
l’entière responsabilité du propos.
Un jour, Édouard partit
à la chasse. Passant près du château de Wareham, qui
appartenait à sa belle-mère, il désira aller dire bonjour
à son petit demi-frère chéri. Elfride était
là. Le voyant venir, elle courut à sa rencontre et lui
présenta une coupe afin qu’il se rafraîchisse. Elle faisait
semblant d’être ravie mais elle était accompagnée
d’assassins.
Édouard, ne se méfiant
de rien, porta joyeusement la coupe à ses lèvres. Et pendant
qu’il était en train de boire le coup de l’étrier, un
domestique, payé par Elfride, lui donna un coup de poignard dans le
côté. Dès qu’il se sentit blessé, il piqua son
cheval pour rejoindre les siens mais le sang coulait à flot et
Édouard tomba du cheval pour mourir.
C’était le 18 mars 978.
Il était roi depuis trois ans.
Elfride fit traîner son corps
par les pieds jusqu’à la masure d’une pauvre femme, aveugle
de naissance, afin qu’il fut enterré secrètement. Mais la
pauvre aveugle, en touchant le corps d’Édouard recouvra la vue et
une grande lumière envahit la maison. Elfride fit alors jeter le corps
dans un marais proche puis se retira dans un autre château de sa
possession, loin du lieu du crime.
Un an après, personne
n’avait retrouvé le corps d’Édouard. Mais un jour,
Dieu suscita quelques fidèles qui se rendirent vers les marécages
où ils virent une grande colonne de feu. Intrigués, ils
vidèrent le marais et découvrirent le corps
d’Édouard qui fut ramené dans l’église de la
Sainte Vierge à Wareham le 13 février 979. A l’endroit
où l’on trouva son
corps, Dieu fit jaillir une source qu’on a appelée la Fontaine de
Saint Édouard. Bien des gens y guérirent de leurs maladies.
Le bruit des retrouvailles se
répandit dans toute l’Angleterre. Elfride était
détestée pour sa méchanceté.
Alfer, prince des Merciens,
réussit à réunir beaucoup de gens afin d’honorer la
mémoire d’Édouard. On fit venir quantité
d’abbés et d’évêques, ainsi que Sainte Vilfride,
abbesse du monastère de Winchester et Edithe, soeur
d’Édouard, qui était religieuse.
Quand on leva le corps
d’Édouard, que l’on retrouva aussi frais que le jour de sa
mort, Edithe, se jeta sur le corps de son frère et le couvrit de baisers
en pleurant.
Il fut conduit au monastère
de Shaftesbury le 18 février 981.
Après tout ça, la
perverse Elfride fut touchée par le repentir. Elle voulut visiter les
reliques d’Édouard mais chaque fois qu’elle
s’avançait pour les voir, une force l’empêchait de
passer. Elle ne put les visiter ni à pied ni à cheval.
Édouard était
vengé !
Néanmoins, en
pénitence, elle fit construire deux monastères : Wherwell et
Ambresbury, et finit ses jours dans le premier. On n’eut donc pas
l’occasion de chauffer des mules à blanc pour qu’elle les
chausse afin de danser jusqu’à ce que mort s’en suive comme
dans Blanche-neige.
Ethelred, nommé roi,
fut lâche et malheureux. Toutes sortes de calamité envahirent
l’Angleterre, dont l’invasion des Danois.
Les
reliques du corps de Saint Édouard furent distribuées, comme d’habitude, un peu
partout. On lui donna le titre de martyr, bien qu’il n’eut pas
donné sa vie pour la cause de la religion. Mais c’est surtout pour
le distinguer d’Édouard III le confesseur.